De pas leur statut juridique, les travailleurs indépendants ne disposent pas des mêmes conditions et des mêmes droits au chômage que les salariés. Nous faisons le point sur toutes les mesures chômage à connaître pour les travailleurs indépendants, et sur leurs spécificités.
Travailleur indépendant et chômage : ce qu’il faut savoir
Pour rappel, un travailleur indépendant ou freelance , est une personne physique qui travaille à son compte : cette personne n’a donc pas de contrat de travail. Il peut s’agir d’un micro-entrepreneur (ou auto-entrepreneur), mais aussi d’un gérant d’entreprise individuelle, d’EIRL (entreprise individuelle à responsabilité limitée), de SASU (société par actions simplifiée unipersonnelle), de SAS (société par actions simplifiée)...
En France, on comptait 3,6 millions de travailleurs indépendants en 2019. C’est donc un statut de plus en plus plébiscité. On constate d’ailleurs une croissance annuelle de 3,3 % du nombre de travailleurs indépendants en l’espace de 10 ans, de 2009 à 2019.
Il faut savoir que le statut de travailleur indépendant ne bénéficie pas de la même protection que le statut de salarié. Toutefois, de plus en plus de mesures sont mises en place pour limiter la précarité des TNS (Travailleur Non Salarié).
Ainsi, depuis janvier 2020, les travailleurs indépendants exerçant une activité commerciale libérale ou artisanale sont soumis au régime général de la Sécurité sociale (et plus à la RSI) au même titre que la grande majorité des Français. Cela leur permet de bénéficier d’une prise en charge santé, maternité, invalidité et droits de retraite… Ce régime permet notamment de bénéficier (sous réserve de respecter certaines conditions), de compensations en cas de perte de revenus.
Le travailleur indépendant peut également prétendre à l’ARE (Allocation d’aide au retour à l’emploi).
Le droit à l’assurance chômage pour les travailleurs indépendants
Le 1er novembre 2019, dans le cadre de la Loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, de nouvelles mesures chômage ont été mises en place pour les travailleurs indépendants, leur permettant de bénéficier de l'assurance chômage (ATI : Allocation pour Travailleurs Indépendants), et cela sans avoir à verser de cotisations sociales supplémentaires.
Qui peut bénéficier de l’assurance chômage ?
L’ATI est réservée aux travailleurs indépendants dont l’activité entre dans la liste de professions éligibles fixées par la loi . Il s’agit, entre autres, d’exploitants agricoles, de débitants de tabacs, de mandataires judiciaires, de mandataires d’assurance, d’artistes -auteurs, de certains gérants et dirigeants de société attachés au régime général de la sécurité sociale…
Pour bénéficier de cette aide, il faut également répondre aux conditions suivantes, fixées par le décret n° 2019-796 du 26 juillet 2019 :
Le travailleur indépendant doit avoir exercé une activité professionnelle non salariée de manière ininterrompue pendant 2 ans minimum au sein d’une seule structure ;
L’activité professionnelle doit avoir cessé à cause d’un redressement judiciaire (une autre personne doit vous avoir remplacé en tant que dirigeant) ou à cause d’une liquidation judiciaire :
→ Par conséquent, une simple cessation temporaire de l’activité ne permet donc pas de bénéficier de l’allocation chômage.
Le travailleur indépendant doit avoir généré, grâce à son activité, un revenu de 10 000 € minimum par an pendant les deux dernières années précédentes (7 500 euros par an minimum à Mayotte) ;
→ Le revenu de l’activité correspond au chiffre d’affaires (CA), sans l’abattement fiscal (71 % pour les activités commerciales ; 50 % pour les activités artisanales ; 34 % pour les activités libérales).
Les ressources personnelles du travailleur indépendant (en dehors des revenus générés par l’activité) doivent être inférieures à 564,78 € mensuels pour une personne seule (montant RSA) et à 282,39 € pour les résidents de Mayotte.
Le demandeur doit être en recherche d’emploi effective.
Par ailleurs, certains travailleurs indépendants ne pourront pas bénéficier des cotisations chômage. C’est le cas :
Des associés uniques ou gérants associés uniques d’une EURL (Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée) ;
Des gérants égalitaires ou gérants majoritaires d’une SARL (Société à Responsabilité Limitée) ;
Des associés ou des gérants d’une SCS (Société en commandite simple) ou d’une SCA (Société en commandite par actions) ;
Des associés ou des gérants associés d’une SNC (Société en Nom Collectif) ;
Des contrôleurs de gestion ou des membres d’un GIE (Groupement d’intérêt économique).
Les personnes qui se trouvent dans l’un de ces cas de figure devront alors souscrire, de manière volontaire, un contrat d’assurance de garantie chômage ou de perte d’emploi auprès d’un organisme privé.
Vous pourrez retrouver la liste de toutes les personnes pouvant bénéficier des allocations chômage sur l’article L5424-24 du Code du travail .
Quel est le montant de l’ATI (Allocation chômage des travailleurs indépendants) ?
Tout travailleur indépendant qui remplit les conditions mentionnées plus haut pourra bénéficier d’une indemnisation forfaitaire de 26,30 € par jour, soit environ 800 € par mois (à Mayotte, le montant est fixé à 19,73 € par jour, soit environ 600 € par mois), et ce pendant une période de 182 jours calendaires (6 mois), sans délai de carence, et à compter du moment où il sera inscrit sur Pôle emploi.
Il pourra bénéficier de cette assurance chômage à plusieurs reprises (à condition de remplir, à chaque demande, les critères précités).
Travailleur indépendant : quand réaliser votre inscription sur Pôle emploi ?
Si vous répondez aux conditions ci-dessus et que vous souhaitez bénéficier de l’assurance chômage pour travailleur indépendant, il faudra vous inscrire sur Pôle emploi dans un délai d’un an, à compter de la date de la cession de l’activité (liquidation judiciaire ou redressement judiciaire).
Cotisations chômage et déduction fiscale
Sachez que si vous bénéficiez de l'assurance chômage, vous pourrez déduire les cotisations versées par Pôle emploi de votre revenu imposable. La déduction fiscale ne doit pas excéder 1,875 % du bénéfice imposable, dans la limite de 329 088 € par an.
Comment bénéficier de l’allocation chômage pour indépendant ?
Si vous pensez répondre aux critères d’attribution de l’allocation chômage pour travailleur indépendant, il vous faudra réaliser une demande auprès de Pôle emploi :
Vous pouvez contacter votre conseiller si vous êtes déjà inscrit sur la plateforme en tant que demandeur d’emploi ;
Si vous n’êtes pas déjà inscrit, vous pouvez contacter un conseiller en vous rendant dans une agence Pôle emploi de votre département, ou bien par téléphone, par mail ou par courrier.
Le conseiller prendra connaissance de votre demande et vérifiera dans un premier temps que vous répondez aux conditions d’obtention requises pour l’ARE (Allocation de Retour à l’emploi). En effet, cette aide est prioritaire à l’ATI, et vous sera accordée si vous êtes éligible.
Si vous n’êtes pas éligible à l’ARE, mais que vous pouvez prétendre à l’ATI, votre conseiller Pôle emploi vous indiquera les démarches à réaliser pour procéder au versement des indemnisations chômage. Par ailleurs, sachez que vous ne pouvez pas cumuler l’ATI et l’ARE.
Mesures chômage pour travailleurs indépendants et Covid-19
La mise en place de cette allocation chômage est particulièrement importante dans le contexte actuel, quand on sait que pendant le premier confinement, au printemps 2020, 73 % des sociétés françaises ont déclaré une baisse de leurs ventes supérieure à 10 %, et 35 % d’entre elles ont déclaré une baisse supérieure à 50 % (Source : Insee).
Malheureusement, les conditions d’obtention de l’ATI restant assez strictes, très peu de travailleurs indépendants ont pu en bénéficier. Alors que le gouvernement prévoyait la mise en place de l'assurance chômage pour 30 000 indépendants chaque année, seuls 828 dossiers ont été retenus par Pôle emploi, 649 dossiers sont en cours d'instruction et 1 074 dossiers ont été rejetés, selon les chiffres rapportés par Les Échos .
Mesures chômage pour les travailleurs indépendants : à quoi s’attendre en 2021 ?
Face à ce constat, le gouvernement envisage, depuis janvier 2021, d’améliorer les conditions d’obtention et d’augmenter le montant de cette allocation chômage pour les travailleurs indépendants.
Vers des nouveaux critères d’obtention ?
Ces pistes de réflexion concernent d’abord les conditions d’attribution de l’allocation chômage. Assez strictes à l’heure actuelle, celles-ci pourraient potentiellement ne plus se limiter uniquement aux cas de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, mais pourraient être élargies aussi aux cessions d’activité temporaires. En effet, dans le contexte exceptionnel de crise sanitaire et de crise économique, de nombreuses fermetures administratives et de fermetures temporaires ont actuellement lieu, et ne permettent pas à ces travailleurs indépendants de bénéficier d’une indemnisation chômage.
Vers un nouveau montant de l’ATI ?
Par ailleurs, le montant actuel de l'allocation chômage pour les travailleurs indépendants s'élève actuellement à moins de 10 000 euros par an, ce qui s'avère très précaire compte tenu de la situation actuelle. En effet, à cause de l'instabilité des marchés financiers, et des restrictions sanitaires , beaucoup de travailleurs indépendants se retrouvent sans revenus, souvent endettés, et sans aucune indemnisation chômage.
Une réflexion est donc actuellement menée pour envisager un nouveau potentiel de calcul de l'indemnisation du chômage pour les indépendants. Le calcul pourrait alors être réalisé en fonction des revenus antérieurs du travailleur non salarié.
En revanche, il faut garder à l'esprit qu'il ne s'agit là que de pistes de réflexion et de propositions, formulées par le ministre des PME Alain Griset, mais que rien n'a encore été acté.
Sachez cependant que plusieurs aides ont été mises en place pour les travailleurs indépendants dans le cadre de la crise sanitaire. Pour en savoir plus, consultez notre article: Tout savoir sur les aides Covid-19 pour les travailleurs indépendants .