Au cours d’une assemblée générale, le processus de décision d'une société peut être complexe dès lors que associés ou actionnaires sont impliqués. Il peut arriver que quelques personnes ne représentant qu'une part modérée des droits de vote aient un pouvoir de blocage de certaines décisions. Nous vous proposons de revenir sur le cas de figure de la “minorité de blocage” et sur ses conséquences sur le fonctionnement d’une société.
Qu'est-ce qu'une minorité de blocage en assemblée générale ?
L'existence de minorité de blocage résulte des conditions de majorité requises pour faire adopter certaines décisions. Dans le cas où une majorité de 75% des droits de vote est requise, on peut en déduire que la ou les personnes possédant plus de 25% des parts peuvent bloquer l'adoption de ces décisions.
Dans un cas extrême où une décision nécessite l'unanimité des associés, n'importe lequel d'entre eux peut bloquer son adoption. La minorité de blocage est alors très réduite puisqu'elle est égale à une part.
Les associés minoritaires sont ceux qui possèdent le moins de parts ou d’actions dans l’entreprise. La minorité de blocage leur permet donc de ne pas être lésés dans leur pouvoir de décision face aux associés majoritaires.
A savoir : La minorité de blocage diffère en fonction des entreprises et du type de décision qui est prise au cours de l’Assemblée Générale (AG).
Clause de minorité de blocage : Définition
Il n'y a pas de clause de minorité de blocage à proprement parler. Il s'agit d'une conséquence des conditions de majorité définie dans les statuts.
En SARL, les règles statutaires sont fixées par la loi alors que dans d'autres formes juridiques, une plus grande liberté est laissée aux rédacteurs. Il importe donc d'être tout à fait conscient des conséquences de chaque clause.
Les différentes minorités de blocage selon les statuts juridiques
Les règles concernant les minorités de blocage varient en fonction des statuts juridiques des entreprises. Le fonctionnement de la minorité de blocage suivant chaque type d’entreprise est le suivant :
Quelle est la minorité de blocage dans une SARL ?
Les entreprises possèdent leurs propres règles en matière de minorité de blocage, selon la nature de leur statut juridique.
En SARL (société à responsabilité limitée), les associés disposant de la minorité de blocage peuvent s’opposer à une décision pouvant concerner :
- La modification des statuts ;
- Les décisions relatives à la gestion de l’entreprise ;
- La dissolution de la société ;
- L’approbation des comptes annuels.
Toutefois, les statuts de la SARL peuvent prévoir d’autres décisions susceptibles d’être bloquées par la minorité de blocage.
La minorité de blocage étant déterminée par le nombre de parts sociales détenues par les associés, le seuil des voix requis pour pouvoir exercer une minorité de blocage correspond, pour les SARL crées avant août 2005, à un quart du capital social de la SARL. Pour celles crées après août 2005, la minorité est fixée à 1/3 des parts détenues par les associés participant au vote (il faut donc être présent ou représenté lors de l'AG pour faire jouer cette minorité).
Quelle est la minorité de blocage dans une SAS ?
En SAS (société par actions simplifiée), la minorité de blocage est déterminée par le nombre d’actions détenues par les actionnaires. Le seuil des voix requis pour exercer une minorité de blocage en SAS dépend des règles fixées dans les statuts de la société. Les conditions dans lesquelles la minorité de blocage peut être appliquée sont également précisées dans les statuts.
Quelle est la minorité de blocage dans une SCI ?
Dans une SCI (société civile immobilière), dans le silence des statuts, les décisions relevant d'une assemblée générale ordinaire nécessitent la majorité des voix. On peut en déduire que la minorité de blocage est obtenue avec la moitié des parts sociales.
Toujours dans le silence des statuts, les décisions relevant d'une assemblée générale extraordinaire nécessitent l'unanimité des voix. La minorité de blocage est donc obtenue avec une voix.
Quelle est la minorité de blocage dans une société anonyme (SA)
En SA (société anonyme), la minorité de blocage est définie par le nombre de voix détenues par les actionnaires.
En SAS, pour qu’une minorité de blocage puisse s’opposer à une décision proposée par la majorité, elle doit détenir au moins un tiers des droits de vote de la société.
Les statuts de l’entreprise peuvent toutefois prévoir d’autres règles en matière de minorité de blocage.
Comment constituer une minorité de blocage ?
La constitution d’une minorité de blocage dans une société dépend de sa forme juridique, et pour constituer une minorité de blocage, les associés doivent détenir une part de capital social suffisante afin d’atteindre le seuil minimum fixé par les statuts de la société, ou le cas échéant, par le Code du commerce.
Les associés qui souhaitent constituer une minorité de blocage doivent donc s’assurer de posséder le bon nombre de parts sociales ou d’actions pour atteindre ce seuil.
Quel est le pouvoir d'un associé ou actionnaire disposant d'une minorité de blocage ?
Un associé disposant d’une minorité de blocage a le pouvoir de bloquer une décision importante concernant la société, en votant contre ou en s’abstenant au cours du vote en assemblée générale. Ce pouvoir peut être significatif selon les situations , car il permet aux associés minoritaires de faire valoir leurs intérêts et de protéger la société contre d’éventuelles décisions prises sans leur consentement.
La voix de l’associé en minorité de blocage compte autant que celle de tous les associés réunis, il a donc le pouvoir de contraindre les autres associés à renoncer à leur décision.
Qu'en est-il de l'abus de minorité ?
L’abus de minorité consiste, pour les associés minoritaires, à utiliser leur droit de veto de façon abusive. En effet, les associés qui disposent d’un droit de blocage ont un pouvoir important dans les décisions prises par l’entreprise, car ils peuvent s’opposer aux décisions prises par la majorité. Ce pouvoir peut-être plus ou moins important en fonction des dispositions légales et statutaires en vigueur dans la société. Cependant, les associés disposant de la minorité de blocage doivent être prudents dans l’utilisation de ce pouvoir, car un blocage trop fréquent des décisions pourrait nuire au bon fonctionnement de l’entreprise.
Il y a par exemple abus de minorité lorsque les associés font passer leurs propres intérêts avant ceux de l’entreprise, en allant à l’encontre de ceux des autres associés, ou lorsqu’ils s’opposent à une décision qui permettrait de sauver une entreprise en péril.
Ce sont les tribunaux qui apprécient l'existence d'un abus de minorité.
Quels sont les risques en cas d'abus de minorité ?
L’abus de minorité est une pratique qui permet d’utiliser le pouvoir de la minorité de blocage de façon abusive ou excessive, en s’opposant de façon systématique aux décisions prises par la majorité, sans tenir compte des intérêts de la société ou des autres associés.
Cette pratique peut avoir des conséquences négatives importantes non seulement pour la société, mais aussi pour les associés disposant de la minorité de blocage. Les risques en cas d’abus de minorité de blocage sont les suivants :
- Une entrave au fonctionnement de l’entreprise, en empêchant les prises de décisions importantes pour le développement et la croissance de la société ;
- Des conséquences financières négatives pour la société et les associés, en empêchant la réalisation de projets rentables ;
- Des conflits entre les associés, qui peuvent nuire aux relations de travail et aller jusqu’à des procédures de médiation, des actions en justice ou encore jusqu’à la dissolution de la société ;
- Des risques financiers et juridiques pour l’associé qui utilise son pouvoir de minorité de blocage de manière abusive. Si une action contraire aux intérêts de l’entreprise est avérée, il peut en effet être tenu responsable des dommages causés à la société et être soumis à des sanctions et poursuites judiciaires.
Comment éviter l'abus de minorité ?
Il existe plusieurs moyens pour éviter l’abus de minorité de blocage :
- Fixer des règles précises lors de la rédaction des statuts de la société, afin de poser un cadre à l’utilisation de la minorité de blocage ;
- La négociation et la communication entre associés ;
- La médiation, pour trouver une solution à l’amiable à l’aide d’un médiateur professionnel ;
- Les sanctions en dernier recours, qui peuvent être précisées dans les statuts de la société.